Dr. Vladimir Granoff
Peut-on parler d‘orthodoxie
en psychanalyse ?
(Paru dans Problèmes de psychanalyse, Cahier n° 21 des Recherches
et débats du centre catholique des intellectuels français, Librairie
Arthème Fayard, novembre 1957, pp. 59-67.)
A entendre parler ceux qui sont aujourd'hui des savants, nul
doute semble-t-il, ne peut exister. On en parle. On ne parle même que de
cela. Une psychanalyse classique, un psychanalyste orthodoxe, non, lui n'est pas
très orthodoxe etc., etc. ? Qu'est donc cette doctrine par rapport
à laquelle il est si aisé de distinguer les orthodoxes de ceux qui
ne le sont pas ? Et quel est le critère d'aussi parfaites
évidences ? C'est aussi la démarche de celui qui pèse, juge
et tranche, qu'il nous faut ici questionner.
Sachons, ne serait-ce que pour
changer, être non avertis et ne pas cacher notre surprise. Elle sera celle
de tout un chacun fût-il clerc ou non. Comment se fait-il que pareille
question se soit posée avec son cortège de terrifiantes
conséquences, dans la psychanalyse, où ne devrait régner
que la froide raison, où, comme en toute science, le ton du débat
“ objectivement scientifique ” devrait toujours prévaloir
?
La psychanalyse n'a-t-elle pas acquis droit de cité dans la
médecine d'aujourd'hui ? Elle ne compte plus ses succès, les
médecins lui confient leurs malades en nombre sans cesse croissant. Elle
a depuis longtemps perdu cette auréole inquiétante de
nouveauté équivoque. Le corps des psychanalystes s'est solidement
constitué. Pourquoi ce déchaînement de passions ?
Il
semblerait a priori naturel qu'en psychanalyse les choses aillent du train
où elle vont dans les sciences médicales. L'unanimité comme
en toutes matières y est fort rare. Diverses théories s'y
partagent l'opinion. Souvent elles divergent, parfois elles sont
contradictoires. Le jugement dépend de la sanction des faits, ou est
suspendu dans leur expectative. C'est l'épreuve du traitement, de
l'évolution, de l'examen de laboratoire. C'est l'attente du recul
statistique suffisant. Et l'on voit mal pourquoi, alors qu'en psychanalyse
aussi, l'on guérit ou l'on échoue, la même discipline ne
règne pas dans le débat.
Mais à y regarder de plus
près, l'on s'aperçoit rapidement qu'en médecine
également des controverses s'élèvent au terme desquelles
des interdits sont prononcés, et l'histoire de la médecine dans
son passé récent nous montre à l'aube de l'ère
pastorienne à quelle extrémité les hommes de science se
sont trouvés portés. Cet exemple est du reste
caractéristique. Car il est en ces occasions un facteur qui constamment
se retrouve. Dans l'occurrence “ une forte personnalité ”
autour de laquelle, pour ou contre, se déchaînent les
passions.
C'est précisément la situation que nous trouvons en
psychanalyse. Car lorsqu'il est dit d'un psychanalyste qu'il est orthodoxe, le
sous-entendu est orthodoxe freudien.
Il n'y a qu'à voir la fortune
diverse des termes “ classique ” et “ orthodoxe ” en
psychanalyse. Si la plupart des auteurs semblent avoir à juste titre,
quelque vergogne à utiliser la notion de classicisme par rapport à
un exercice assez récent et assez divers, il n'en est guère qui se
sentent embarrassés pour juger la plus ou moins grande orthodoxie des
cures, des écrits, des personnes. Car ils jugent par rapport à
l'œuvre de Freud. Telle qu'ils la comprennent à travers leur propre
recherche ou plus souvent l'enseignement qu'ils en ont reçu. Il y aura
donc des chapelles, voire une église. Si l'on défiait
l'appartenance à une orthodoxie dans le domaine dont il est ici question,
comme étant l'adoption dans sa totalité d'une doctrine
promulguée d'une façon originale par un homme, il découle
de l'application de cette notion qu'il y a dans ce domaine même des
hérésies.
Est-ce le cas ? L'orthodoxie, allant de pair avec
l'intangibilité de la doctrine, laquelle garantit sa valeur,
l'hérésie ne saurait être assimilée à une
simple différence ou à un vice mineur. Elle sera au contraire la
doctrine pervertie. Donc totalement perdue. Cela peut-il être, sinon
objectivement du moins vraiment ? Et, dans ce cas, par rapport à quelle
vérité ?
Avant de tenter de donner à ces questions
leur réponse, si tant est qu'elle puisse être donnée sans
réserve, il convient au préalable de tourner son regard vers ce
qui en fait se passe dans le sein de la population
psychanalytique.
Là du moins peut-on espérer trouver quelque
lumière et des données plus simples à apprécier. En
effet, après que les œufs de cane aient été
rejetés ou soient eux-mêmes tombés hors du nid du vivant
même de Freud, on peut considérer que les psychanalystes freudiens
sont depuis lors “ restés entre eux ”. La stabilité de
leurs institutions dont le développement et la complication vont en
croissant pourrait en faire foi.
Or le protocole des débats
auprès des instances qui légifèrent et l'expérience
quotidienne montrent l'évidence des plus graves dissensions dont le bruit
franchit même les murs vainement érigés autour du lieu des
débats. Certains de leurs échos en France même sont encore
dans beaucoup d'oreilles. Et si l'on se reporte à l'histoire même
du mouvement psychanalytique l'on s'aperçoit qu'en dehors des grands
schismes il en fut toujours ainsi. A cette différence près que, de
son vivant, le recours à l'initiateur en personne était possible.
Et la présence ou l'absence de ce dernier confère tout son sens
à la situation.
Car en effet le problème de l'orthodoxie
freudienne n'est à proprement parler apparu qu'au lendemain de la mort de
Freud. De son vivant c'est bien plutôt d'obédience freudienne qu'il
convenait de parler. Pour que le nom de Freud soit invoqué comme il l'est
présentement, il fallait que d'abord Freud meure. En son nom aujourd'hui
des interdits sont jetés, des anathèmes prononcés, des
révocations décidées. En son nom des enseignements sont
déclarés néfastes, des maîtres déclarés
sans foi ni loi. Lorsque les circonstances s'y prêtent, privés de
leur habilitation d'exercer la psychanalyse. Là encore, se marque la
différence irréductible qui sépare cette discipline, des
disciplines médicales.
Car si en médecine des praticiens
peuvent être suspendus, c'est en général pour des
manquements à la discipline au sens restreint du terme, et non à
une orthodoxie.
Pour comprendre cet état de choses, c'est à
l'histoire du mouvement qu'il faut se reporter. Il ne saurait ici être
question de l'envisager dans son ensemble. Une seule de ses facettes est ici
à considérer.
Freud, et lui seul, est l'invention de la
psychanalyse. Il est seul à l'avoir menée au point de son
développement que nous lui connaissons aujourd'hui et il demeure seul
responsable de la totalité de sa démarche. D'autres auteurs ont
suffisamment mis l'accent sur le caractère radicalement novateur de son
invention pour qu'il soit nécessaire ici d'y revenir. Qu'il suffise de
dire que si sa théorie plonge ses racines dans la science de son temps,
elle s'en différencie autant que la fleur du bulbe dont elle est issue et
que sa portée révolutionnaire en fit une des aventures les plus
totales et les plus authentiques de l'esprit
humain.
Considéré de l'extérieur, son
développement apparaît sinueux. La ligne inflexible de son
progrès n'apparaît qu'à l'étude de l'œuvre de
Freud. Elle vit le jour dans un climat hostile. Elle fit contre elle
l'unanimité. Il fallait une volonté de fer et une obstination sans
pareille pour persévérer. Il fallait certes du courage, beaucoup
de confiance et de dévouement à Freud en personne pour être
de ses disciples. Le résultat fût d'un genre qui rend plausible sa
comparaison avec un “ commando ”.
Et l'on sait que Freud ne fut
pas lui-même sans céder quelque peu, pour un temps, à
l'attrait quasi-romanesque de cette épopée. Si le rêve d'une
confrérie unie par un pacte secret ne pouvait qu'être
déçu, l'on peut cependant noter au passage que dans l'esprit de
Freud qui le conçut, ce n'était pas un jeu d'enfant. Il en avait
du reste bien passé l'âge. C'est dire que dans cette
épopée que fut l'analyse, les choses ne sont jamais allées
sans passion.
L'histoire de l'analyse montre précisément que
sa substance fut d'une part faite de l'élaboration de la doctrine
freudienne, d'autre part du cours plus ou moins tourmenté de
l'adhésion des élèves à l'œuvre du
maître. Ce dernier, de son vivant, encore avait par rapport à
l'agora adopté une attitude légèrement en retrait. Et l'on
ne peut se défendre de l'impression que si Freud se sentait le gardien de
son invention, il estimait inévitable qu'autour d'elle des luttes se
déchaînent dans une relative incompréhension de son
œuvre. L'on ne peut dire que le génie de Freud apparaisse jamais
totalement dévoilé. Le sentiment demeure qu'il n'a pas dit “
son dernier mot ”.
Ceci était bien propre à entretenir
sa suite dans une relative incertitude, propre à engendrer toutes les
interprétations. C'est ainsi que l'on voit les doyens du mouvement fonder
sur leur connaissance personnelle passée du maître de Vienne, des
prises de position parfois très divergentes.
La situation se trouve
compliquée par surcroît du fait que 1'œuvre écrite est
entre toutes paradoxale. Et comme telle se prêtant admirablement à
l'exégèse. Pour les uns, elle est d'une clarté limpide et
ses fragments à la limite impénétrables, à
écarter pour n'en pas compromettre la simplicité et le
côté opérationnel. Pour d'autres plus prudents ou plus
respectueux, c'est dans ce paradoxe que réside son unité
même, de laquelle rien ne saurait être amputé sous peine de
ruiner tout l'édifice.
Dans les fragments les plus difficiles,
spéculatifs dit-on parfois de manière péjorative, ils
voient la clef de voûte de tout l'ouvrage. Le méconnaître
résilie radicalement tout titre à y entendre quoi que ce soit. Et
rappelons que sur le problème cardinal dit du dualisme instinctif, les
avis restent totalement divisés.
Aucun faisceau de circonstances ne
semble a priori plus impropre à fournir des bases aux jugements
radicaux sur l'orientation doctrinale des psychanalystes. Or c'est le contraire
qui semble manifeste.
Ce n'est qu'en essayant de comprendre la situation
par le biais même de la méthode analytique, que l'on parvient
à se rapprocher de son explication.
Par rapport à la
psychanalyse Freud a occupé et occupe une place que personne n'a
songé ou ne songe à lui contester. Posons cet
élément du problème comme donnée initiale et
supposons pour l'instant, et par commodité, que rien ne soit depuis venu
amender cette proposition. Dès lors tout appel à l'arbitrage
freudien était du temps de son vivant, une référence
à un dire possible, à un non-encore dit, de Freud. Depuis sa mort
l'invocation de son nom se réfère à quelque chose qui, du
moment où il ne l'a pas dit est son dire possible, qu'il ne dira jamais.
Ainsi l'on peut lui faire dire n'importe quoi. L'on se trouve, toutes
proportions gardées, dans quelque chose qui n'est pas très
différent du surmoi freudien précisément. Qui justement, et
c'est sa destination même, ne dit rien. Et à ceux qui font jouer
l'absence réelle de Freud dans la conjoncture de cette manière,
l'on peut dire que bien des éléments dans la doctrine de Freud ne
disent plus grand’chose.
Est-il possible de porter un jugement sur
cet état des choses ? Était-ce évitable ? Peut-être.
Mais l'on ne voit guère comment on aurait pu
l'éviter.
Irréductible à quelque discipline
médicale existante, la psychanalyse est pétrie d'une philosophie
qui se donne malaisément.
Hors d'elle, la psychanalyse reste
inapprochable et incompréhensible. Étant cependant une
médecine, elle figure aussi, au registre des sciences qui jusqu'à
hier et parfois aujourd'hui faisaient, pourrait-on dire profession d'afficher
ouvertement leur éloignement de toute philosophie. Et c'est dans les
rangs des médecins que la psychanalyse a recruté la plupart de ses
adeptes. De plus l'envergure de son promoteur semble dépasser tellement
celle de ses élèves et la portée de son message, la
compréhension de ceux qui lui ont succédé, que l'on ne peut
s'étonner ni du pessimisme avoué de Freud quant à la valeur
de l'effectif humain du mouvement, ni du fait que c'est toujours à son
œuvre que les psychanalystes doivent faire retour, œuvre qui du reste
n'a certainement pas encore dévoilé toutes ses richesses. Enfin
son style même, bien que d'une magistrale clarté formelle, est
modulé par la cadence spéciale de l'enseignement freudien qui
réduit à néant tout espoir de facilité qu'un
optimisme irréfléchi pourrait concevoir à une lecture
superficielle. Remettant sans cesse en mouvement les éléments au
fur et à mesure de leur acquisition, elle maintient le tout dans un
frémissement vivant et continu, bien peu fait pour donner à
l'esprit des assises tranquilles ou confortables. Une paraphrase dantesque
pourrait véritablement imiter ceux qui se proposent l'étude de la
psychanalyse, à déposer sur son seuil toute nostalgie de
confort.
Il est certain que cette situation a sécrété
son remède, tant sur le plan de la valeur surmoïque de Freud, qu'au
niveau de l'inconfortable philosophie de son enseignement. La question serait
plutôt de savoir si le remède n'est pas pire que le mal. Il n'est
que trop clair que la complication n'existe que dans la mesure où l'on
accepte d'en prendre son parti. Aussi certains courants modernes ont-ils
décidé de simplifier, au point de créer une psychanalyse
que l'on pourrait dire aérodynamique. Quant à l'autorité de
Freud, elle s'est trouvée en fait rejetée sur les points
litigieux, bien qu'apparemment sauvegardée quant au reste. L'invocation
de Freud devient alors purement formelle et équivalente à ce que
les anglo-saxons appellent “ lip-service ”. La bouche prononce des
paroles que la tête ne pense pas. Sous forme de rajouture ou d'amputation,
se forme ainsi une doctrine néo-freudienne. Toutes apparences
étant sauvegardées, elle se réclamera d'une stricte
orthodoxie freudienne. Cette néo-formation doctrinale est en psychanalyse
un surgissement caractéristique de notre époque.
Est-ce
à dire pour autant, à la lumière de ce bilan que la notion
même d'orthodoxie en psychanalyse soit à rejeter en bloc, tel un
fardeau importun aux néfastes conséquences ? Certes non. Freud, de
son vivant avait déjà été témoin des suites,
malheureuses parfois, qu'entraînaient l'expansion de la psychanalyse et
l'organisation de ses institutions. Il s'y est opposé avec colère
souvent, mais finalement avec une certaine noblesse, comme si un
désintérêt subit l'avait frappé à l'endroit de
la créature dont son esprit avait accouché. Ni l'âge ni la
maladie vers la fin de ses jours n'expliquent cette attitude de la part d'un
homme resté jusqu'à la fin aussi fécond. Il semblerait
plutôt qu'il se soit agi en l'occurrence d'une certaine résignation
à ne pas pouvoir influer sur ce qui, dès lors que c'était
révélé, échappait à son pouvoir. Et
peut-être cette sévérité des passions surgies
est-elle à tout prendre un moindre mal garantissant l'œuvre contre
une dilution complète, déjà entreprise du reste de son
vivant, contre l'abandon de toute discipline théorique ou technique et
répercutant dans ses conflits mêmes, les conflits psychiques de
l'étude desquels elle est née.
Si donc, il est difficile de
dire qui détient cette orthodoxie, où elle est et où elle
n'est pas (nous excluons naturellement les élaborations d'où la
doctrine freudienne est quant à l'essentiel évacuée), il
est possible d'affirmer qu'elle est nécessairement quelque part et que
c'est même dans cet affrontement des contradictions qu'elle est
peut-être réellement.
De la difficulté à la
définir, peut-être est-il possible d'extraire ce qu'elle n'est pas,
à coup sûr. En aucun cas cette orthodoxie freudienne ne peut
être réduite à son côté formel. Ni sur le plan
théorique ni sur le plan technique.
L'enseignement de Freud avait
des points de référence extra-analytique d'une part, analytiques
de l'autre. Or il ne faut pas oublier que si les premiers sont marqués de
l'empreinte de son temps, les seconds se rapportent à une science en
devenir, non révélée entièrement et comme telle en
mouvement constant.
Aujourd'hui les références
extra-analytiques ne peuvent que se ressentir du point actuel de
l'évolution des sciences et de la pensée contemporaine. La
permanence et l'exclusivité des références internes au
domaine de la psychanalyse stricto sensée, ne peut être un gage de
solidité doctrinale, car il s'agit alors d'un mouvement en circuit
fermé. La psychanalyse étant prise comme doctrine achevée.
Rien n'est plus contraire à la démarche de Freud et à
l'ébranlement continu auquel tout y est soumis. Ce freudisme quiet ne
ferait que tirer de la non-définition de ses prémisses, le fruit
de sa tranquillité.
L'orthodoxie freudienne ne peut guère
davantage se réduire à une standardisation du
procédé technique. De cela Freud avait suffisamment averti. Si
dans l'ensemble l'on constate empiriquement une certaine ressemblance de surface
dans le procédé, d'un point à l'autre du globe, cela tient
à la nature propre du dialogue. Il reste que chacun y prend part à
sa façon. Et les enquêtes plus ou moins adroites qui ont
percé le mur d'une considérable réticence chez les
interrogés, font apparaître de vastes divergences. Ce n'est pas le
style du divan ou la couleur du fauteuil qui pourront servir de repère.
Ni rien de ce que des esprits vétilleux, se seront un jour complus dans
ce domaine à codifier pour se soustraire le lendemain aux exigences
même de leur codification.
Il semble au contraire, qu'au lieu de
regarder par le gros bout de la lorgnette, qu'au lieu de tenter de poser comme
étalon une analyse type et ses constituants, il faille procéder
dans l'ordre inverse. Et prendre comme indication de l'orthodoxie freudienne, ce
qui chez Freud se laisse le moins facilement définir, circonscrire,
étiqueter, cataloguer. Son souffle, dans toute son amplitude. En un mot
son style. Riche, serré jusqu'à en être touffu certes mais
aéré, ouvert. D'abord couper les barbelés. Après le
grand angulaire, le téléobjectif, mais après seulement.
Pour s'apercevoir dans le cœur de la mise au point que suivre Freud
garantit la psychanalyse contre tous les traquenards où l'on s'acharne
à la faire tomber.
Et tout d'abord celui de lui faire transgresser
ses limites, tout en l'empêchant de bien exploiter l'aire qu'elles
délimitent. L'analyse n'est pas un système du monde et elle n'en
donne pas l'explication, pas plus qu elle ne lui permet un avenir meilleur. Elle
n'est pas une thérapeutique sociale. Elle n'est pas un exercice
d'adaptation. L'on ne peut rien en elle trouver pour alimenter un certain
optimisme sans vergogne où les psychanalystes trouveraient un alibi, ou
l'excuse de leur ségrégation.
Elle n'est rien d'autre qu'une méditation ardue et sans cesse remise
en question sur le discours des sujets. Une oreille ouverte aux paroles qu'ils
adressent au delà du fauteuil à quelqu'un qui n'est pas là.
Discours dans lequel et absence par laquelle les paroles des sujets particuliers,
retrouvent leur insertion dans le discours universel. C'est là, le seul
ressort de la cure. Qu'elle ne puisse pas tout guérir, Freud nous en
avait lui-même averti.