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Sigmund Freud


Résultats, idées, problèmes [sélection]
(Londres, juin 1938)[1]

(Trad. par Thierry Simonelli, revu par Micheline Weinstein)



16.VI. Intéressant que toutes les diverses réactions, bien évidemment aussi les contradictoires, nées des expériences précoces [frühe Erlebnisse] se conservent. À la place de la décision qui, ultérieurement, serait la marque du succès. Explication : faiblesse de la synthèse, conservation du caractère des processus primaires.



12.VII. En substitut à l’envie de pénis [Penisneid] identification avec clitoris, plus belle expression de l’infériorité [Minderwertigkeit], source de toutes inhibitions. Avec ceci – dans le cas X. – reniement [Verleugnung] de la découverte que les autres femmes n’ont pas de pénis non plus.

— Avoir et être chez l’enfant. L’enfant exprime volontiers la relation d’objet par l’identification : je suis l’objet. L’avoir vient plus tardivement, retombe dans l’être après perte de l’objet. Modèle : sein. Le sein est une partie de moi, je suis le sein. Plus tard seulement : je l’ai, c’est-à-dire je ne le suis pas ...



12.VII. Chez le névrotique on est comme dans un paysage préhistorique, au jurassique par exemple. Les grands dinosaures s’ébattent toujours et les prêles sont hauts comme des palmiers (?).



20.VII. L’hypothèse des traces d’hérédité [Erbspruren] dans le Ça en change, pour ainsi, dire notre vue.



20.VII. Que l’individu soit détruit [zugrunde geht] par ses conflits internes, l’espèce dans la lutte avec le monde extérieur, auquel elle n’est plus adapté, mérite d’être accueilli dans le Moïse.



3.VIII. La conscience coupable [Schuldbewusstsein] naît aussi de l’amour insatisfait. Comme la haine. Effectivement nous avons dû produire toutes sortes de choses à partir de cette matière comme le font les États autarciques avec leurs « produits succédanés ».


3.VIII. Dernier fondement de toute inhibition intellectuelle et au travail semble être l’inhibition de l’onanisme infantile. Mais peut-être que c’est plus profond, non pas son inhibition par des influences extérieures, mais sa nature insatisfaisante en soi. Il manque toujours quelque chose à la décharge [Entlastung] et la satisfaction – en attendant toujours quelque chose qui ne venait point[2] - et cette pièce manquante, la réaction de l’orgasme, s’exprime dans des équivalents dans d’autres domaines, absences, éclatements de rires, pleurs (Xy), et d’autres peut-être.
— La sexualité a ici, une fois encore, fixé un modèle [Vorbild].


22.VIII. Il se peut que la spatialité soit la projection de l’étendue de l’appareil psychique. Aucune autre déduction possible. Au lieu de l’a priori de Kant, les conditions de notre appareil psychique.[3] Psyché est étendue, mais n’en sait rien. [Voir le commentaire de Joël Bernat dans le Lexique.]


22.VIII. Mystique, l’obscure perception de soi du règne extérieur au Moi [Ich], du Ça [Es].



[1] Sigmund Freud, Gesammelte Werke, VXII, pp. 149-152.
[2] Ndt : en français dans le texte.
[3] Ndt : Sur ce point, je m’oppose à la traduction qui dit « Au lieu des conditions a priori de l’appareil psychique selon Kant. » Kant ne se souciait nulle part des conditions a priori de l’appareil psychique ! Freud pense donc plutôt que les conditions de l’appareil psychique se mettent à la place de l’a priori de Kant, qui n’est pas psychique mais transcendantal. Plus précisément, les formes pures (et transcendantales) de l’intuition devraient être remplacées par la constitution empirique (au sens kantien) de l’appareil psychique. Ce faisant, Freud s’inscrit dans la tradition de la philosophie de la nature d’abord, de la transformation de la philosophie transcendantale par la suite, dont la première a été inaugurée par Schelling et la seconde par Herbart. Il est vrai pourtant que le texte allemand est ambigu et qu’une virgule aurait aisément permis de mieux saisir le sens, même sans connaître Kant.

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