L’instrumentalisation des neurosciences

« La recherche n'a pas pu à ce jour identifier de variantes génétiques ayant indubitablement pour effet de créer des différences cognitives ou comportementales. » (Le Monde, 25 mars 2018)
« La recherche n'a pas pu à ce jour identifier de variantes génétiques ayant indubitablement pour effet de créer des différences cognitives ou comportementales. » (Le Monde, 25 mars 2018)
Actes du colloque de Dimensions de la psychanalyse des 30 septembre et 1er octobre 2017
François Ardeven, Jean-Charles Cordonnier, Yann Diener, Jean-Claude Fauvin, Amîn Hadj-Mouri, Karim Jbeili, Simone Lamberlin, René Lew, Jean-Jacques Moscovitz, Frédéric Nathan-Murat, Thierry Simonelli, Pierre Smet
Paris : Lysimaque, 2018.
ISSN 2608-421X
ISBN 978-2-906419-27-8
512 pp. 20 €. PAF 3 €.
Dagmar Herzog
Cambridge : Cambridge University Press, 2017
In Cold War Freud Dagmar Herzog uncovers the astonishing array of concepts of human selfhood which circulated across the globe in the aftermath of World War II.
Against the backdrop of Nazism and the Holocaust, the sexual revolution, feminism, gay rights, and anticolonial and antiwar activism, she charts the heated battles which raged over Freud’s legacy. From the postwar US to Europe and Latin America, she reveals how competing theories of desire, anxiety, aggression, guilt, trauma and pleasure emerged and were then transformed to serve both conservative and subversive ends in a fundamental rethinking of the very nature of the human self and its motivations.
(Avec l’accord des auteurs – les Drs Raymonde Schmitz et Robert Wagener – nous reproduisons ci-dessous la réponse à l’article de G. Steffgen concernant la discussion sur l’« autonomie » du psychothérapeute au Luxembourg)
Je me suis dit que la lettre publiée au WORT par mon collège Robert WAGENER et moi-même en réponse à l’article du Prof STEFFGEN du 18.2.2017 dans ce même journal, pourrait intéresser les lecteurs du blog de psychanalyse.lu.
Dans son article G. STEFFGEN insiste sur la capacité du psychothérapeute exerçant dans le cadre de la nouvelle loi sur les psychothérapies de juillet 2015, de travailler en autonomie totale indépendamment de l’avis et/ou de l’adresse par un psychiatre ou par un autre médecin.
Soit.
Il semble évident de penser que le DSM, le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux de l’Association Psychiatrique Américaine (APA) base ses catégories diagnostiques sur une forme ou une autre d’évaluation statistique des troubles, syndromes ou symptômes psychiques.
Or, rien n’est moins sûr.
À défaut de statistiques, la classification des troubles de l’ainsi-dite « bible de la psychiatrie » devrait fonder sa nomenclature sur des critères scientifiques, publics, cohérents et susceptibles de discussions et de critiques.
Or, rien n’est moins certain.
Dans la discussion sur la tentative d’interdiction de la psychanalyse au Luxembourg, nous venons d’apprendre que la psychanalyse, la « thérapie psychanalytique » et le « procédé psychodynamique » sont désormais synonymes et désignent une seule et même approche.
L’information a été transmise par l’un des principaux détracteurs de la psychanalyse, le président de notre Conseil Scientifique national, nouvellement devenu ardent défenseur et meilleur ami de la psychanalyse. Pour des raisons purement professionnelles, scientifiques et objectives s’entend.
Notre collègue Jean-Claude Schotte a très justement rappelé (voir Les déclarations solennelles après-coup) que contrairement à la prompte assimilation par l’expert, ces désignations ne sont nullement synonymes.
Quiconque a jamais eu la curiosité de s’intéresser aux discussions sur les différences entre psychanalyse et psychothérapie aura pressenti la confusion provoquée par le gommage des différences, tantôt énormes, tantôt subtiles, entre la psychanalyse à proprement parler et les psychothérapies à inspiration psychanalytique (selon la désignation courante dans les pays francophones), les « procédés psychodynamiques » et quelques autres encore …
Joel Whitebook
Cambridge; New York: Cambridge University Press, 2017.
Offering a radically new portrait of the creator of psychoanalysis, this book explores the man in all his complexity alongside an interpretation of his theories that cuts through the stereotypes that surround him.
The development of Freud’s thinking is addressed not only in the context of his personal life, but also in that of society and culture at large, while the impact of his thinking on subsequent issues of psychoanalysis, philosophy, and social theory is fully examined. Whitebook demonstrates that declarations of Freud’s obsolescence are premature, and, with his clear and engaging style, brings this vivid figure to life in compelling and readable fashion.
On a beau mettre en avant l’urgence de la situation luxembourgeoise avec ses nécessités objectives supposées. Il n’en reste pas moins qu’au départ, le projet de loi sur les psychothérapies est né de l’effort concerté d’un nombre très restreint de personnes. Des personnes qui, pour la plupart, n’ont ni la formation, ni l’expérience requises par la loi et par le métier sur lequel elles se sentent appelées à légiférer. Ironiquement, ce sont ces qui ont été désignées pour couper court aux fraudes à l’aide d’une loi à la rédaction de laquelle elles ont contribué.
Malheureusement, parmi ces personnes, peu nombreuses sont celles qui se présentent officiellement comme auteurs ou contributeurs du projet de loi. Et moins nombreuses encore sont celles qui se soient donnés la peine d’en formuler une explication officielle.
Il appartient assurément à l’exercice autoritaire du pouvoir de ne pas avoir à s’expliquer. Car qui s’explique, qui se met à argumenter s’expose au risque de critiques légitimes. Et qui accepte les conditions de la discussion rationnelle abandonne le privilège de la coercition.
Qu’en serait-il alors, si la procédure législative était démocratique ?
Qu’en serait-il, de ce projet de loi, si le législateur s’était donné la peine non seulement d’écouter les deux ou trois intervenants privilégiés, mais d’entendre tous les intervenants sur le terrain ?
Qu’en serait-il donc, si les personnes derrière le projet de loi sur les psychothérapies avaient dû formuler de véritables arguments au soutien d’un texte qui, selon la formulation bien prudente du Conseil d’État, aura « pour effet qu’un certain nombre de personnes pratiquant d’ores et déjà la psychothérapie ne seront plus couvertes par la nouvelle réglementation et s’exposent à d’éventuelles poursuites pour pratique illégale d’actes psychothérapeutiques »[1] ?
Un « certain nombre » ?
Un nombre d’ores et déjà bien certain !
Soit : l’ensemble des thérapeutes, médecins, psychologues ou autres à la base, qui ne disposent pas du futur diplôme de l’Université du Luxembourg ou de diplôme reconnu comme équivalent et qui ne se retrouve pas dans cet « accompagnement psychologique » qu’on leur a apparemment aménagé comme porte de secours.
Qu’en serait-il, si l’on dressait une petite liste ordonnée des arguments glanées ici ou là dans des discussions officielles et inofficielles, dans des entretiens à la radio et dans de petits pamphlets publicitaires ?
Grâce au projet de loi sur les psychothérapies, nous savions que le Luxembourg courait de « grands dangers » et que ses patients, vulnérables par définition, étaient exposés à de « graves dérives ».
Le danger, nous avertissent toujours les alarmistes, viendrait d’un nombre inquiétant de soi-disant « charlatans » se prétendant psychothérapeutes : « […] le constat en terme de prise en charge des patients en psychothérapie est inquiétant: certains d’entre eux ne sont pas traités correctement ou mal accompagnés par de soi-disant psychothérapeutes qui sont soit mal formés, soit pas formés du tout ! »[1]
Qu’on s’imagine !
Mais jusqu’à présent, les ténors de la menace taisaient le nombre de ces malfaiteurs supposés. Les charlatans se propageraient, selon les dénonciateurs, du fait d’une « législation passablement obsolète et qui, surtout, place le commun des patients potentiels dans un brouillard opaque ». (Le Jeudi du 30.10.2014, p. 6).
Nous savons entretemps grâce au président de la Société Luxembourgeoise de Psychologie (SLP) et chargé de direction du Centre d’Information et de Prévention, que « pas mal de gens peu sérieux en profitent pour leur extorquer de l’argent ».
Le brouillard législatif ne cacherait donc pas seulement de faux thérapeutes, mais encore des maîtres-chanteurs s’adonnant à des délits en toute impunité.