Category Psychothérapie

Les déclarations solennelles ‒ après-coup

Les déclarations solennelles ‒ après-coup

(Des mots, des ouvrages, des actes et des normes 1)

Dans le Land du 23 décembre 2016, M. Peter Feist consacre un article très critique, Der ganz normale Wahnsinn, au fonctionnement de certaines personnes au sein du Conseil Scientifique de Psychothérapie.

Dans le Land du 6 janvier 2017, M. Gilles Michaux, une des personnes visées, utilise son droit de réponse, mais pas pour répondre aux critiques massives à son adresse (voir la Gegendarstellung en bas de page). Être accusé en tant que représentant d’une corporation (Zunft) de pratiquer le népotisme (Vetternwirtschaft), ça n’est pas rien. Ne pas y répondre est pour le moins curieux. Quoiqu’il en soit, il s’arrête uniquement sur le dernier paragraphe de l’article, somme toute secondaire, même si ces quelques phrases en fin d’article illustrent bien une certaine manière d’exercer le pouvoir.

Il clarifie ainsi dans sa Gegendarstellung non son attitude dans le Conseil scientifique de psychothérapie à l’égard des psychiatres, mais celle qu’il occupe à l’égard de la « Psychoanalyse », ou de ce qu’il appelle aussi la « psychoanalytische Therapie » ou encore « psychodynamische Verfahren ». Les trois désignations ne sont pourtant nullement synonymes, et on ne peut les utiliser indistinctement sans méconnaître la psychanalyse, sa formation spécifique, ses pratiques, ses théories, son épistémologie, sa manière de construire du social, et son éthique.

“I’m only Human after all”

Only Human

Vous connaissez la chanson?
Et vous connaissez la chanson?
Le LAND du 23.12.16 a publié le nouvel article du journaliste Peter FEIST parlant de psys au pluriel et à petites différences.

J’essaye de résumer, il y aurait :

  • Ceux avec (titre de psychothérapeute)
  • Ceux sans et qui n’en veulent pas
  • Ceux sans et qui n’en auront jamais (selon Gilles MICHAUX, le président du conseil scientifique de psychothérapie créé suite selon la loi du 14.07.2015 sur la psychothérapie au Luxembourg)
  • Ceux sans et qui l’auront peut-être
  • Ceux sans et qui n’en ont pas vraiment besoin
  • Ceux qui vont risquer d’avoir deux métiers (psychiatre et psychothérapeute) et cela pose aussi problème à M. MICHAUX
  • Ceux qui auront aussi deux métiers (psychologue et psychothérapeute) et cela ne pose pas problème à M. MICHAUX
  • Ceux sans et avec autorisation à une activité (de psychothérapie) accessoire
  • Ceux sans et avec autorisation de soigner des personnes qui ne sont pas trop malades (les psychanalystes à ce qu’il paraît)
  • Les remboursés
  • Les pas remboursés
  • Les différemment remboursés

Vous vous y retrouvez ?

Miroir ô beau Miroir, quel est le meilleur thérapeute à voir?

DSC_0252 Je suis nouvelle dans ce pays et cherche un psy. Le meilleur bien sûr pour moi. On m’a dit qu’un conseil scientifique s’est créé au Luxembourg, composé de 6 membres qui eux sauraient quelles sont les psychothérapies sérieuses et efficaces ou non. Cela doit être des gens très savants. Il y aurait un professeur en psychologie de l’Université qui lui-même n’aurait jamais pratiqué ni la psychothérapie ni la psychologie clinique. Il serait d’avis qu’il n’est pas nécessaire de pratiquer soi-même pour pouvoir évaluer les pratiques des autres. Il est vrai qu’une telle pratique pourrait entamer sa belle croyance dans la science. Imaginez un chirurgien n’ayant jamais opéré quitte à avoir étudié toutes les techniques et tous les protocoles opératoires des autres. Lui demanderait-on d’évaluer la pratique de ses collègues? A lui qui n’aurait jamais vu de ses yeux que l’anatomie individuelle n’est pas une copie conforme des dessins dans le livre ? En psychothérapie c’est peut-être différent. Je veux bien y réfléchir si on m’explique. L’abstinence, ne pas prendre la place, ne pas s’y prêter, le savoir vierge, la science qui garantirait. Freud n’avait pas pensé à cette piste quand il s’est posé la question de comment manier les mouvements transférentiels entre patients et psys. L’abstinence par l’abstinence. Et moi, que vais-je faire maintenant? Que me conseillerait le professeur? Madame, réfléchissez bien, prenez plutôt des médicaments ou faites du sport. Si vous voulez absolument prendre le risque d’une rencontre avec vous-même et avec un psychothérapeute, choisissez-en un qui a une pratique scientifique reconnue par nos soins. Cela pourrait diminuer les risques qu’une rencontre ait lieu, rencontrez plutôt une belle théorie qu’un affreux inconnu. Et cela va m’aider, docteur? Vous, on n’en sait rien, mais les chiffres disent que c’est efficace à tel pourcentage sur tel type se symptômes. Vous croyez aux chiffres, j’espère? Merci docteur, je pense que je vais m’abstenir et continuer à chercher le meilleur, le meilleur pour moi.

Juristische Unsicherheit

(L’interview qui suit a paru dans le Tageblatt du 23 février 2015. Les propos ont été recueillis par Luc Laboulle.)

notAcouchTageblatt: Das Parlament wird über ein neues Gesetz abstimmen das den Beruf des Psychotherapeuten etabliert und gleichzeitig auch regulieren und besser schützen soll. Braucht Luxemburg eine solche Regelung?

Jean-Claude Schotte: In den Medien wurde in den letzten Monaten viel Panik verbreitet. Es wurde von Scharlatanen gesprochen, die Geld ergaunern wollten. Die Gesundheitsministerin hat sogar noch einen drauf gesetzt, als sie vor zwei Monaten im Fernsehen behauptete, ohne Reglementierung würden die Scharlatane aus dem Ausland nach Luxemburg kommen. Doch ich frage mich, wo die Zahlen sind, die dies belegen? Wo sind die Studien, die beweisen, dass es so viele gefährliche Scharlatane gibt? Die einzige Organisation, die über Zahlen verfügt, ist die “Patientevertriedung“, die zwei bis drei Beschwerden pro Jahr zählt. Das ist sehr viel weniger als die Beschwerden über Ärzte, deren Beruf gesetzlich reglementiert ist.

Tageblatt: Wie ist die Situation in anderen europäischen Ländern?

Arguments pour une répression des « fraudes »

fraude

On a beau mettre en avant l’urgence de la situation luxembourgeoise avec ses nécessités objectives supposées. Il n’en reste pas moins qu’au départ, le projet de loi sur les psychothérapies est né de l’effort concerté d’un nombre très restreint de personnes. Des personnes qui, pour la plupart, n’ont ni la formation, ni l’expérience requises par la loi et par le métier sur lequel elles se sentent appelées à légiférer. Ironiquement, ce sont ces qui ont été désignées pour couper court aux fraudes à l’aide d’une loi à la rédaction de laquelle elles ont contribué.

Malheureusement, parmi ces personnes, peu nombreuses sont celles qui se présentent officiellement comme auteurs ou contributeurs du projet de loi. Et moins nombreuses encore sont celles qui se soient donnés la peine d’en formuler une explication officielle.

Il appartient assurément à l’exercice autoritaire du pouvoir de ne pas avoir à s’expliquer. Car qui s’explique, qui se met à argumenter s’expose au risque de critiques légitimes. Et qui accepte les conditions de la discussion rationnelle abandonne le privilège de la coercition.

Qu’en serait-il alors, si la procédure législative était démocratique ?
Qu’en serait-il, de ce projet de loi, si le législateur s’était donné la peine non seulement d’écouter les deux ou trois intervenants privilégiés, mais d’entendre tous les intervenants sur le terrain ?
Qu’en serait-il donc, si les personnes derrière le projet de loi sur les psychothérapies avaient dû formuler de véritables arguments au soutien d’un texte qui, selon la formulation bien prudente du Conseil d’État, aura « pour effet qu’un certain nombre de personnes pratiquant d’ores et déjà la psychothérapie ne seront plus couvertes par la nouvelle réglementation et s’exposent à d’éventuelles poursuites pour pratique illégale d’actes psychothérapeutiques »[1] ?

Un « certain nombre » ?

Un nombre d’ores et déjà bien certain !

Soit : l’ensemble des thérapeutes, médecins, psychologues ou autres à la base, qui ne disposent pas du futur diplôme de l’Université du Luxembourg ou de diplôme reconnu comme équivalent et qui ne se retrouve pas dans cet « accompagnement psychologique » qu’on leur a apparemment aménagé comme porte de secours.

Qu’en serait-il, si l’on dressait une petite liste ordonnée des arguments glanées ici ou là dans des discussions officielles et inofficielles, dans des entretiens à la radio et dans de petits pamphlets publicitaires ?