Category Psychothérapie

Sous les pavés, les charlatans

charlatanGrâce au projet de loi sur les psychothérapies, nous savions que le Luxembourg courait de « grands dangers » et que ses patients, vulnérables par définition, étaient exposés à de « graves dérives ».

Le danger, nous avertissent toujours les alarmistes, viendrait d’un nombre inquiétant de soi-disant « charlatans » se prétendant psychothérapeutes : « […] le constat en terme de prise en charge des patients en psychothérapie est inquiétant: certains d’entre eux ne sont pas traités correctement ou mal accompagnés par de soi-disant psychothérapeutes qui sont soit mal formés, soit pas formés du tout ! »[1]  

Qu’on s’imagine !

Mais jusqu’à présent, les ténors de la menace taisaient le nombre de ces malfaiteurs supposés. Les charlatans se propageraient, selon les dénonciateurs, du fait d’une « législation passablement obsolète et qui, surtout, place le commun des patients potentiels dans un brouillard opaque ». (Le Jeudi du 30.10.2014, p. 6).

Nous savons entretemps grâce au président de la Société Luxembourgeoise de Psychologie (SLP) et chargé de direction du Centre d’Information et de Prévention, que « pas mal de gens peu sérieux en profitent pour leur extorquer de l’argent ».

Le brouillard législatif ne cacherait donc pas seulement de faux thérapeutes, mais encore des maîtres-chanteurs s’adonnant à des délits en toute impunité.

De la psychologie au pouvoir

controlDans sa contribution « Petite chronique d’une guerre : les derniers Juifs », Jean-Claude Schotte relate la déclaration de l’un des représentants de la Société Luxembourgeoise de Psychologie, nous désignant de « dernière génération » de psychanalystes au Luxembourg.

Des personnes apparemment mieux avisées suggèrent de ne pas prendre de tels énoncés au pied de la lettre. Le législateur, pensent-ils, ne se laissera pas abuser par les velléités de pouvoir de l’intérêt particulier d’un petit groupe d’influence.  

Pourtant, ces conseils bienveillants ne semblent plus aujourd’hui convaincants. Les velléités de pouvoir ont déjà eu un impact réel sur le texte du projet de loi. De fait, ils le déterminent de part en part.
Et quand il sera voté, le texte déterminera à son tour ce qu’il en sera de la réalité concrète de toute une profession.  

Le pouvoir, selon l’une des définitions les plus concises, consiste dans « la capacité d’une personne ou d’un groupe de personnes d’affecter les résultats de manière à ce que leurs préférences l’emportent sur les préférences d’autres ». [1]

Petite chronique d’une guerre : les derniers Juifs

Je suis psychanalyste, je parlerai donc en tant que tel. Le psychanalyste que je suis est toujours intéressé de savoir qui parle, à partir d’où, au nom de qui ou de quoi, et à qui. Question d’adresses si vous voulez – des adresses, ma foi, qui ne sont pas nécessairement connues, ni même de ceux qui parlent. S’il est des choses que le psychanalyste sait, c’est par exemple qu’il ne sait pas d’emblée ni même jamais tout à fait entre qui cela se joue, par-delà les premières apparences. Les paroles des analysants nous arrêtent, nous interpellent.
Au printemps 2013, je ne réalisai pas encore à quel point ma pratique est une affaire proprement politique, tant dans mon cabinet qu’en dehors. Et je n’envisageais point que je consacrerais dans l’année qui suivrait bientôt une bonne part de mon temps à faire de la politique, à l’extérieur de mon bureau. Aujourd’hui, en cet automne 2014, il m’apparaît obligé de partager quelques expériences, faites entretemps. Elles sont surprenantes, je dirais même stupéfiantes. Il faut que quelqu’un s’en rappelle. J’entreprendrai donc d’en communiquer quelques unes. On pourrait baptiser cela Petite chronique d’une guerre.
La guerre, dit-on, est violente, meurtrière : elle surgirait là où des différends n’arrivent pas à être résolus par le débat, dans un échange d’idées, par des concessions de part et d’autre. La politique en revanche serait le terrain plus civilisé de la persuasion, des arguments, des actes aussi, ceux qui créent du nouveau, qui débloquent la situation, qui rendent possible une coexistence paisible, durable. Est-ce exact ?

Pourquoi la psychanalyse risque-t-elle de disparaître du Luxembourg ?

censureQuand les scientifiques se mettent à raisonner en des termes aussi abstraits et grandiloquents que certains chefs d’État, il est important de dresser l’oreille.

Alors que l’« exposé des motifs » de la première version du projet de loi luxembourgeois sur la psychothérapie nomme la psychanalyse parmi les approches thérapeutiques ayant fourni les preuves d’une « validité scientifique tangible », alors que le discours ministériel et politique a toujours exprimé sa bienveillance et sa « bonne foi » à l’égard de la psychanalyse, alors même que les auteurs du projet de loi se sont toujours dits ouverts d’esprit, les premiers concernés, certains cliniciens travaillant sur le terrain ont rapidement senti le roussi.

Car ce qui se manigance derrière les beaux discours de l’ouverture, ce qui se mijote derrière les belles faces de la tolérance n’est rien de moins qu’une attaque radicale de la diversité thérapeutique.

Les psychanalystes sont loin d’être les seuls à avoir attiré l’attention sur cette contradiction entre la face publique – la publicité mensongère – et la signification pratique et concrète de la règlementation monopolistique d’une profession.

La psychanalyse existe

Luxembourg, le 29 septembre 2014 La Commission parlementaire de la Santé, de l’Égalité des chances et du Sport va bientôt adopter une législation sur les psychothérapies dont l’effet – et peut-être l’intention – est de dépouiller une profession de sa diversité. Cette diversité est officiellement affichée, de même que les intérêts des patients qui doivent être protégés d’apparents graves dangers de thérapeutes travaillant hors du cadre d’une “science” définie nulle part. Mais de fait, les conditions d’accès à la formation, au titre et à la profession postulées par la nouvelle loi excluent, sans autre détour, tout psychothérapeute qui ne soit ni médecin, ni psychologue, ou qui n’ait pas fait ses études de psychothérapie à l’Université du Luxembourg. Alors que la procédure législative est plus ou moins bouclée, la Commission de la Santé invite les représentants de quatre groupes de psychothérapeutes pour un dernier échange d’idées de 30 minutes.

La Société Psychanalytique du Luxembourg est consciente que sous sa forme actuelle, la loi Luxembourgeoise condamne l’avenir de la psychanalyse au Luxembourg. Ainsi, le Luxembourg sera le seul pays en Europe où de futurs psychanalystes ne pourront plus exercer du fait de ne pas avoir de formation calquée sur le modèle de Master en Psychothérapie de l’Université du Luxembourg. (Inversement, les personnes ayant réussi ce Master ne pourront le faire valoir nulle part ailleurs qu’au Luxembourg.) Lire la suite ... >>>