La prétention au pouvoir au nom de la science
La prétention au pouvoir au nom de la science
(Des mots, des ouvrages, des actes et des normes 2)
Un scientifique est un scientifique, sans doute. Et on peut même expliciter ce que cela signifie, en interrogeant sa façon de formuler et de mettre à l’épreuve des énoncés qui expliqueraient certains phénomènes qui ne peuvent être ces phénomènes–là, « certains » phénomènes et pas d’autres, qu’à la condition d’avoir été cernés et construits dans un ordre de raison, eu égard à une causalité présumée spécifique et autonome.
Un psychologue peut ainsi être un scientifique et pratiquer la recherche scientifique psychologique, si tant est que la psychologie ait un certain objet de recherche, une ou des causalités psychiques, qui lui soient propres ‒ question qui mérite déjà toute une discussion en soi, et qui implique notamment le départage du champ sociologique et du champ psychologique.
On remarquera d’ailleurs que bon nombre d’écrivains, romanciers et dramaturges notamment, sont de très fins psychologues, sans jamais prétendre pratiquer la psychologie scientifique. On aurait tort de croire aujourd’hui qu’ils ne puissent rien nous apprendre au sujet des humains qu’ils mettent en scène à travers leurs personnages. Il y eut même un temps où la lecture d’œuvres littéraires était jugée, et à mon sens à juste titre, une des formations indispensables aux futurs psychiatres, tout autant que d’autres formations, d’ordre biologique, psychopathologique et clinique.